Avec son 6e album en carrière, Koriass réitère les raisons de son succès. Connu pour son sens imparable du refrain, mais surtout pour ses couplets tranchants, le MC de Québec est back sur la track. Les deux dernières années n’ont pourtant pas été de tout repos, ni pour Koriass, ni pour personne. Ses difficultés comme ses victoires, le rappeur les encapsule avec brio dans Abri de fortune (pour fin du monde), une œuvre-refuge où les sommets côtoient les profondeurs. Rencontre.

Le coup d’éclat télévisuel de l'année peut certainement être décerné au programme télévisuel La fin des faibles. Aux côtés de Sarahmée et Souldia, Koriass forme pour une deuxième fois le tiercé appelé à juger du niveau des artistes en lice. « Je suis très content du résultat et de la réception de l’émission, confie le dénommé Korey Hart. Le mandat, c'était d’amener le rap à la télé et que ça reste crédible, que ça soit fait dans les règles de l’art. Les gars d’End of the Weak étaient impliqués, donc on n’a pas eu de soucis à se faire. »

Koriass se dit très admiratif des participants étant donné la pression qu’implique une apparition télévisuelle. Cette expérience a d’ailleurs été une occasion de se lier d’amitié avec ses collègues, une complicité assez visible sur le morceau Épitaphe, premier extrait d’Abri de fortune (pour fin du monde). « L’instrumental était prévu pour un feat avec Souldia, confie-t-il. On avait rien fait dessus, puis est venu le moment où on devait rapper pour l’émission. Donc plutôt que de faire un medley de nos chansons respectives, j’ai eu l’idée de mettre Sarahmée dessus et qu’on performe la track sur le plateau. »

Avec Abri de fortune, le rappeur nous amène en terrain connu. Sa collaboration avec Imposs apparaît donc comme une belle surprise, lui qui n’a pas trop l’habitude des featurings. Tous les rappeurs ont leur bucket list, et beaucoup de ces listes contiennent le nom d'Imposs. « Les membres de Muzion sont dans le top de ma liste. J’ai ce moment ancré dans ma tête depuis mes 16 ans : j’écoutais le clip de Rien a perdre à MusiquePlus. J’étais comme : “what the fuck, c’est fou raide ça”. [Imposs] m’a littéralement appris à rapper. Si je devais choisir un top 5, il serait clairement en haut. »

Cet amour pour la culture hip-hop est audible sur plusieurs morceaux de son album. Sur 3e avenue, Emmanuel Dubois (de son vrai nom) reprend l’air du refrain de Shook Ones Pt. 2 de Mobb Deep : « Le fichier de l’instrumental de Ruffsound s'appelait Poor Man Shook Ones à la base (rires). » Avec ses drums old school, la pièce opère un retour aux sources qui se ressent tant dans la musicalité que des paroles. « Même si le titre de la track c’est 3e avenue, elle parle surtout de moi et des épreuves difficiles par lesquelles je suis passé dans les dernières années. C’est une track qui me représente bien. C’est dans la même lignée que Enfant de l’asphalte : il y a quelque chose de nostalgique, de real, de rassembleur dedans. »

Lors de notre rencontre, Koriass avoue être à la fois anxieux et perfectionniste de nature. Ainsi, il n’est pas rare qu’il remette en question la qualité de ses morceaux avant de les sortir. Quoique ce sont ces mêmes doutes qui l’aident à se surpasser. « J’ai l’impression que je dois penser comme ça pour me challenger. Pour moi, c’est jamais assez dope. Souvent, je me compare à d’autres artistes américains et je me dis que c’est de la petite bière ce que je fais. Quand je dis que “Même selon mes standards, j’suis average”, c’est de l’anti-brag. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, je suis un gars hypersensible qui overthink beaucoup d’affaires. (…) Je [ne] peux pas faire autrement. »

L’un des rappeurs les plus vantards du game a aussi ses démons, lesquels il a dû affronter lors d’un court séjour en hôpital psychiatrique. Certains médias l’ont décrit comme un homme en rémission, ayant un moment touché le fond. Koriass profite donc de notre conversation pour nuancer cette perception. Bien qu’il ait traversé des difficultés, il ne souhaite pas que ça le définisse : « il y a ben du monde qui l’ont eu plus difficile que moi. »

Coriace, il l’est. Il a souhaité le rappeler en réalisant Abri de fortune (pour fin du monde) avec l’aide de Ruffsound et Philippe Brault. Au cœur d’un système ébranlé par un virus meurtrier, le rap constitue un lieu d’évasion, où on a le luxe de se perdre ou de se canaliser. Koriass en use avec maîtrise, construisant son abri pour mieux faire tomber le masque.

Abri de fortune (pour fin du monde) est toujours disponible sur toutes les plateformes numériques, et en vente en ligne sur la boutique du site Web de 7ième Ciel Records.

Koriass - Abri de fortune (pour fin du monde) // Album

Crédit photo : Félix Renaud

Page d'accueil