Pour plusieurs artistes issus de milieux sociaux difficiles, le rap est souvent vu comme une porte de sortie, une chance d’utiliser la musique comme vecteur d’un message de survie et d’espoir. Avec la montée en flèche de la popularité du trap québécois, c’est une histoire admirable qu’on entend souvent et qui convainc les auditeurs de la véracité du vécu d’un rappeur. Dans le cas de Soubillz, qui présente aujourd’hui son premier album Né pour briller, le récit est un peu différent. C’est ce qui différencie l’approche du jeune rappeur de 19 ans, avec qui on s’est entretenus au téléphone pour la sortie de son projet. 

Tout perdre pour se trouver

Au premier abord, le succès de Soubillz est impressionnant: 19 ans, plusieurs clips qui comptent plus de 100 000 visionnements, dont « Gucci » qui a dépassé le million, et une validation par plusieurs noms importants de la scène. Celui qu’on retrouve fréquemment aux côtés de Lk Tha Goon, Bilo Tha Kid, Lost, Capitaine Gaza, YH ou Russkov semble faire l’unanimité. Un fait d’armes remarquable pour un artiste qui ne fait qu’arriver. Au centre de tout ça, une histoire qui est la sienne, et que le rappeur met bien de l’avant. 

« C’est important pour moi que les gens connaissent mon histoire, parce qu’elle est différente, confie Soubillz au bout du fil. Je viens de Ville Mont-Royal et dans ma jeunesse, j’étais bien, ma famille avait beaucoup d’argent. C’était normal d’avoir une grande maison, une belle voiture. C’est plus tard que j’ai connu la rue. »

La vie dans le quartier cossu était confortable mais les plans du rappeur et de sa famille ont malheureusement été chamboulés. 

« Quand j’ai eu sept ans, mes parents ont perdu leur business et c’est là que tout s’est effondré. À chaque année, on déménageait dans une plus petite maison, puis dans des apparts, on arrivait pas à boucler les fins de mois. Pour un enfant comme moi qui n’avait jamais connu ça, ç’a été un choc, et je me suis retrouvé dans la rue en croyant que j’allais aider ma mère, parce que mon père a dû repartir en Tunisie à ce moment-là. »

C’est pendant son adolescence que Soubillz a trouvé la rue dans le quartier voisin de Ville Saint-Laurent. Sauf qu’après des démêlés sérieux avec la justice, le jeune montréalais a dû trouver une autre voie - celle du travail et des études. 

Le détenteur d’un DEP en gestion d’entreprise s’est donc lancé dans la musique, sans avoir conscience de ce qui l’attendait. Parce qu’une fois dans la musique, tout s’est accéléré très rapidement. 

« Honnêtement, j’avais pas conscience de tout ce qui pouvait se passer avec la musique, c’est allé tellement vite, explique-t-il. Mais ça m’a fait comprendre que je pouvais utiliser ça pour aider ma famille, améliorer notre situation. C’est pour ça que je parle autant de work dans ma musique, je veux retrouver la vie que j’avais avant. »

Prêt à briller

C’est dans ce contexte qu’arrive Né pour briller, un album rempli de promesses qui compte sur un duo de choc à la production. Car si Soubillz accumule les chansons populaires depuis deux ans, c’est qu’il sait aussi bien s’entourer. Désormais épaulé par l’équipe de BLCKchain Entertainment, le rappeur peut ainsi travailler avec ses in-house producers, les talentueux Hypnotic et Lens Dupuy. Ce dernier se démarque en Europe depuis quelques années, notamment grâce à des productions pour Damso, Jok’air ou encore Mister V et MB. 

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C’est suite à sa rencontre avec les deux producers que Soubillz a compris leur importance dans la conception d’un album.

« On est allés au chalet avec les producers et mon management, et c’est là que j’ai compris l’ampleur de leur travail, raconte celui qu’on appelle également SB. On a travaillé ensemble au chalet pour faire l’album. Les gars travaillaient des prods, j’allais devant le micro et ça venait tout seul. »

Sur cet album, le rappeur invite la famille proche, alors que seuls Lk Tha Goon, Russkov et Baba sont présents en featuring. Avec le spotlight donc bien posé sur Soubillz, on découvre un rappeur confiant, à la voix surprenamment habile qui ose s’aventurer dans des directions plus pop, sur « Lendemain », « Ton name » ou « Rock N Roll », par exemple. Les trompettes de cette dernière surprennent, et laissent penser que l’artiste a un potentiel à développer au niveau commercial. 

Il reste à voir si ce potentiel se réalisera, mais une chose est sûre, on doit désormais compter Soubillz parmis les artistes sérieux d’une scène en pleine explosion. Le flow est fluide, l’ambition est claire et le but est précis. 

« J’ai déjà tout perdu. Maintenant, je veux tout reprendre. »

On vous invite à écouter Né pour briller, maintenant disponible sur tous les services de streaming.

Photo : Sam Fiasco

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