Vendredi dernier, le Québec apprenait la fermeture du VOIR. Cette plateforme culturelle qui existait depuis 1986 n’a effectivement pas survécu à la crise des médias, aujourd’hui accentuée par la COVID-19. En préparation d’une relance éditoriale complète, incluant de nouveaux collaborateurs, VOIR s’est plutôt éteint à petit feu dans les dernières semaines.

L’équipe a confirmé le tout le premier vendredi du mois de juin 2020. « Le magazine culturel «Voir» ne reviendra pas cet automne », lisait-on dans la plupart des médias québécois. Sauf que le VOIR était beaucoup plus qu’un journal ou un magazine. Sa présence en ligne était notable. Depuis la mise à pied temporaire de la majorité des employés à la mi-mars, cette présence était assurée par une seule et même personne, Sara Barrière-Brunet, la rédactrice en chef. Malheureusement, la mise à pied temporaire est finalement devenue permanente et les deux derniers employés perdent aussi maintenant leur emploi. La fin d’une époque.

Si le VOIR laisse un énorme vide dans le monde culturel et médiatique québécois, HHQc.com tient à rappeler l’importance qu’il a eue pour le rap d’ici. Des entrevues jusqu’aux critiques, les mentions des acteurs de la scène hip-hop locale dans les pages et les hyperliens du VOIR se sont multipliés pendant des années. Depuis 2016, tout cela s’était accentué avec l’arrivée de la chronique Rap local d’Olivier Boisvert-Magnen. Journaliste actif dans le rap québécois depuis les belles années du blogue Hiphopfranco.com, Riff Tabaracci, de son pseudonyme, s’était donné comme mission de parler de tout ce qui pourrait avoir un quelconque impact. Semaine après semaine, le journaliste répertoriait les sorties hip-hop dans un article qui avait pratiquement les airs d’une infolettre.

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De Raccoon à Backxwash, VOIR a très souvent été la première entrevue écrite pour les rappeurs d’ici. « On me le disait et, après, j’avais l’impression que les autres médias pouvaient avoir un oeil là-dessus. Ça a souvent étoffé les dossiers de recherches à Radio-Canada », affirme Olivier Boisvert-Magnen, joint par téléphone, mardi après-midi. C’est qu’avant Rap local, la couverture spécialisée était plutôt stagnante. Mise à part quelques émissions de radio, aucun média numérique ne couvrait encore aussi bien le rap québécois que le VOIR. En plus, tout cela provenait d’un média plus traditionnel et plus généraliste que les sites web s’intéressant simplement au hip-hop. L’impact au sein de l’ensemble des non-initiés semblaient donc plus fort.

« HHQc.com et Damainsource ont bien pris le relais. Ma voix n’est plus essentielle », estime Olivier Boisvert-Magnen. Toutefois, au-delà de la couverture spécialisée en rap, qu’adviendra-t-il? Est-ce que les médias traditionnels se tourneront, par exemple, vers HHQc.com comme ils l’ont fait avec la chronique Rap local? Personne ne peut encore répondre à la question.

À la blague, on affirmait que « le ⅔ des dossiers de presse risquent de fondre ». Une remarque qui n’est peut-être pas si loin de la réalité. Avec la fermeture du VOIR, un changement doit s’opérer. Certains journalistes généralistes devront possiblement revoir leurs habitudes ou sortir un peu de leur zone de confort. Sans quoi, c’est toute la couverture médiatique locale du rap et de la musique en général qui risque d’y goûter.

Photo : Archives VOIR

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